Je m’appelle Milan Keleuva. Je suis né à Glina le 11 mars 1979. Pour ceux d’entre vous qui ne sont pas experts en géographie, cette ville se trouve en Croatie. Maintenant j’habite à Kosjeric, en Serbie. J’y vis depuis 1995. Je suis à la base mécanicien (mais ne m’appelez pas pour réparer votre voiture). Mais ma profession est peintre, parfois photographe et lorsque j’ai le temps j’aime faire du vélo. Jusqu’à ce jour j’ai participé à quelques expositions et également 5 fois à un concours d’artistes amateurs à Zlatibor. J’ai grandi sans parents. Mon frère, ma sœur et moi avons vécu à Petrinja dans un orphelinat de 1985 à 1988. Puis notre tante nous a adoptés et nous sommes allés à Glina pour vivre avec elle. J’ai commencé à peindre, en fait à dessiner, en 1993. La raison pour laquelle j’ai commencé à dessiner est peu intéressante. Mon meilleur ami et moi dessinions des caricatures. Puis j’ai continué à en dessiner de très vilaines d’un homme avec 3 cheveux sur la tête. Cet homme se moquait d’une fille que j’adorais. Elle était mon inspiration. Pendant la guerre en Croatie, il n’y avait pas d’électricité pour regarder la Télé. Je passais beaucoup de temps à lire des livres et bien sûr dessiner. J’ai arrêté quelques mois, même un an sans en faire un seul, puis j’ai eu une période d’inspirations où j’en ai réalisé des centaines. Malheureusement, ces dessins sont restés à Glina lorsque nous sommes partis en 1995. A cause de la guerre. J’espère qu’ils sont sur les murs de quelqu’un, et qu’ils n’ont pas fini dans un feu. J’aimerais beaucoup revoir ces dessins. Un an a passé depuis l’orage (Oluja) et je n’ai plus fait un seul dessin. Je me demandais pourquoi j’avais arrêté. Je ne le savais pas. Puis j’ai pris un crayon et dessiné ce même homme laid comme il y avait 3 ans, puis un deuxième, puis un troisième… Chaque nouveau dessin était de mieux en mieux. Pendant plusieurs années, j’ai vécu dans un centre pour réfugiés. J’ai fait plusieurs centaines de dessins. En novembre 2000, je me demandais qui j’étais et où j’étais… Que faire ? J’avais 21 ans et je vivais dans un centre pour réfugiés à Varda, à 18 km de Kosjeric. Sans emploi et sans perspectives d’avenir. La seule idée qui me plaisait était de devenir peintre, mais je n’étais pas capable de vendre mes œuvres. Peut-être que mes peintures n’étaient pas si bonnes. Peut-être fallait-il que je trouve un emploi ? Alors j’ai commencé à chercher du travail et j’ai trouvé. Pendant 18 mois je faisais 40 km par jour pour aller travailler, en auto-stop, ou n’importe quel autre moyen de rentrer à la maison (si l’on peut appeler un centre pour réfugiés une maison), en travaillant l’hiver glacial et l’été étouffant. Je n’ais pas abandonné la peinture. Dès que je rentrais je prenais un pinceau et je peignais. J’ai même réussi à vendre quelques peintures. Pas cher bien sûr, mais j’en ai vendu. Le 19 janvier 2003, j’ai eu ma 1ère exposition à Kosjeric. Une étape importante. Il y avait 80 visiteurs. Pour Kosjeric, c’était un succès, particulièrement parce que la température était de -20° dehors. Le nom de l’exposition était « monde noir et blanc ». il y avait 20 peintures d’exposées. En octobre 2004 je suis allé à Zlatibor rencontrer Bozo Kovacevic, un peintre réputé, pour qu’il me donne un avis sur mes toiles, des conseils, des idées. Sa seule remarque fût que je devais rajouter des couleurs. La peinture que je peignais à l’époque s’appelait Walker, il l’a beaucoup aimé. Elle n’était pas terminée. Il a dit « pour moi, telle quelle est, cette peinture est terminée » « Tu as du talent, continues à peindre ». Après ce qu’il m’a dit, cela m’a redonné confiance en moi. Mais soyons clairs, je ne peignais à l’époque que des peintures en noir et blanc. La première où j’ai mis de la couleur « Jedrenjak » je l’ai réalisée en 2005. le noir et blanc est ce que je préfère, mais pour plaire j’ai rajouté des couleurs. Obrad B. Jovanovic, un peintre académique m’a donné des huiles colorées et des conseils pour peindre avec. C’était nouveau pour moi, mais j’ai réussi à m’habituer rapidement. Cela a mis beaucoup de temps pour que je puisse vivre de mes toiles. Et chaque année cela va de mieux en mieux.